NKM. « Le Net chamboulera encore nos vies »

Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État à l'Économie numérique. David Adémas

Internet, est-ce un nouveau média, très performant, ou tout autre chose ?
Les gens qui n’y voient qu’un nouveau média se trompent. On entre dans une nouvelle dimension : la société numérique. Ses règles de fonctionnement sont très différentes du monde ordinaire. Y domine la règle du partage et non plus celle de l’autorité par exemple.

Cette nouvelle société nous embarque-t-elle dans une sorte de Facebook généralisé ?
Internet, comme toute technologie, n’a pas de dimension morale. Internet n’est pas bien ou mal, bon ou mauvais. C’est un outil. Il faut sortir des discours, ou béatement fascinés, ou diabolisateurs, et poser des garde-fous. Voilà le défi.

Quelles règles imposerà Internet ?
J’ai lancé, par exemple, une réflexion sur le droit à l’oubli numérique. Nos ordres judiciaires font tous droit à la prescription, à l’oubli. Internet, lui, est une espèce de mémoire éternelle. Nous devons donc obtenir des prestataires l’organisation d’un tel droit à l’oubli, à l’anonymat si on le souhaite, à travers une charte internationale. J’y travaille.

Est-ce que le développement du télétravail ne va pas cannibaliser la vie privée ?
En France, nous sommes en retard sur le télétravail et c’est un handicap. On compte 7 % de télétravailleurs contre 25 % aux USA. On le voit à tort comme un travail exclusivement chez soi. L’organisation la plus efficace est mixte, elle comprend des jours en entreprise. Des obligations d’être joignables à telle heure et pas à telle autre. Il ne doit pas y avoir cannibalisation de la vie privée.

Internet est-ce un enjeu politique, un instrument en faveurde la démocratie ?
Il peut offrir une nouvelle dimension à la démocratie. La question n’est pas de savoir si l’on va dématérialiser le vote, si l’on pourra à l’avenir voter de chez soi. C’est subalterne. Il s’agit de savoir si les technologies du 2.0 (interactives) seront utilisées pour interpeller les élus, savoir ce qu’ils font et les contrôler quand on a le sentiment que cela ne va pas.

[via] Bernard Le Solleu, ouest-france.fr