Pourquoi l’informatique a du mal à recruter
L'informatique va recruter 5 000 personnes dans l'Ouest cette année (ici, la société Steria, à Nantes). Franck Dubray
5 000 emplois à pourvoir dans l’Ouest ! Mais salaires et déplacements dissuadent les jeunes diplômés,selon les syndicats. « Nous offrons des perspectives de carrière », rétorque la profession.
Repères
Combien l’informatique offre-t-elle d’emplois en 2011 ?
Steria embauche 250 personnes dans l’Ouest. Sodifrance, basé à Rennes, une centaine. ASI (Nantes) une quarantaine, etc. En tout, 5 000 emplois sont proposés dans l’Ouest et 40 000 en France, selon le syndicat patronal Syntec numérique : les trois quarts dans des sociétés de service qui mettent des informaticiens à disposition de clients : banques, assurances, industrie… Des secteurs où la reprise se profile.
Comment se passele recrutement ?
Pas facile. « Il y a de la concurrence », confie un responsable de ressources humaines qui observe aussi une désaffection des jeunes : « Ils sont attirés par l’Internet ou les jeux vidéo. Mais le métier de développeur, consistant à entrer les codes, leur paraît moins attractif. Pourtant, il demande analyse et réflexion. » Narendra Jussien, chef du département informatique à l’École des Mines de Nantes, confirme : « Nous n’avons que 24 étudiants ingénieurs informaticiens en dernière année, alors que nous en avons eu jusqu’à 40. »
Pourquoi ces difficultés de recrutement ?
Elles concernent avant tout les sociétés de service, estime l’association professionnelle Munci (2 500 adhérents). « Bon nombre sont comparables à des sociétés d’intérim : elles placent les informaticiens chez les clients, sans apporter d’expertise globale, dit Régis Granarolo, son président. Par ailleurs, les informaticiens préfèrent être salariés des sociétés qui les utilisent. Cela évite de passer d’un client à l’autre tous les six mois. » Il déplore aussi du « jeunisme ». Ces sociétés rechigneraient à conserver les plus âgés en raison de leur rémunération. Gilles Davoine, de la CFDT, s’interroge, lui, sur le manque d’attractivité salariale : « La convention collective fait démarrer des jeunes à bac + 5 à moins de 2 000 € brut ». Il évoque aussi les nombreux déplacements.
Qu’en dit la profession ?
Guy Mamou-Mani, président de Syntec numérique, juge la vision de la CFDT et de Munci « dépassée ». « Aujourd’hui, les sociétés de service offrent des perspectives de carrière aux salariés ». Sur le « jeunisme », Guy Mamou-Mani renvoie l’argument : « Nous, au moins, nous recrutons des dizaines de milliers de jeunes ! » Et les plus expérimentés ne sont pas oubliés : « Mon entreprise, par exemple, leur propose des postes de consultants. »
Les petits salaires ? « C’est en partie exact. Une journée de développeur est facturée 300 à 500 € par le prestataire aux clients : ces derniers devraient accepter de payer plus pour valoriser les compétences. » Il soupire : « Et les pouvoirs publics ne nous apportent aucun soutien, alors que nous créons de l’emploi. »
[via] Jacques Sayagh, ouest-france.fr